Le cabinet d’avocats en droit des technologies de l’information & de l’internet Crefovi est ravi de vous offrir ce blog en droit des nouvelles technologies & données personnelles, afin de vous fournir des informations novatrices et pertinentes sur les principales problématiques juridiques et commerciales auxquelles le monde du numérique & des hautes technologies est confronté.
Ce blog en droit des nouvelles technologies & données personnelles fournit des nouvelles et actualités, régulièrement, et présente des résumés de récents communiqués de presse, sur les problématiques juridiques auxquelles la communauté globale de l’informatique, des médias et de l’internet font face, en particulier au Royaume-Uni et en France. Ce blog en droit des nouvelles technologies & données personnelles fournit aussi des actualisations et commentaires ponctuels sur les problématiques juridiques dans les secteurs du ‟hardware”, des logiciels et du commerce en ligne. Ce blog est géré par l’avocat en droit de l’informatique & de l’internet de notre cabinet, qui dédie sa pratique au conseil de nos clients du secteur de l’informatique & de l’internet à Paris, Londres, et internationalement sur toutes leurs affaires juridiques.
Crefovi pratique le droit de l’informatique, hardware & logiciels depuis 2003, à Paris, Londres et à l’international. Crefovi conseille un éventail large de clients, couvrant tant des start-ups du monde de la tech ayant besoin de conseils juridiques pour gérer leurs problématiques contractuelles, fiscales et en droit de la propriété intellectuelle, que des larges corporations – renommées dans les secteurs des technologies de l’information et ‟Consumer discretionary” – ayant besoin de négocier et finaliser leurs accords de licence ou de distribution et/ou de faire respecter leurs droits de propriété intellectuelle. L’équipe ‟Internet & médias numériques” de Crefovi participe à des transactions de premier plan. Elle assiste des sociétés de pointe, startups, PME ou matures, sur des problématiques de fusions & acquisitions; contentieux, à l’inclusion du contentieux en propriété intellectuelle; transactions financières; émissions de titres; structuration d’opérations internationales transfrontalières; transactions technologiques et relatives à la propriété intellectuelle; joint ventures et sur des dossiers relatifs au droit d’expression sur internet, droits à la protection de la vie privée, publicité, e-commerce et protection des consommateurs et aux problématiques réglementaires. Crefovi écrit et gère ce blog en droit des nouvelles technologies & données personnelles pour guider ses clients au travers des complexités du droit de l’informatique et de l’internet & des médias numériques.
L’associée fondatrice et gérante de Crefovi, Annabelle Gauberti, fréquente de manière régulière, et est un intervenant sur des panels organisés durant, d’importants événements du calendrier du monde des technologies de l’information et de l’internet, tels que les foires de CES, Slush, SXSW, Viva Technology, Wired et Web Summit.
En outre, Crefovi a des équipes sectorielles qui appliquent leur expertise sectorielle approfondie afin de servir au mieux les intérêts commerciaux de leurs clients. Certaines de ces équipes sectorielles sont le département ‟Informatique, hardware & logiciels”, et le département ‟Internet & médias numériques”, qui gèrent le contenu du blog en droit des nouvelles technologies & données personnelles ci-dessous, pour vous.
Annabelle Gauberti, associée fondatrice et gérante du cabinet d’avocats en droit des technologies de l’information & de l’internet Crefovi, est la présidente de l’Association internationale des avocats pour les industries créatives (ialci). Cette association est essentielle pour organiser des séminaires, webinars & sessions de réflection de très haute qualité, sur les problématiques juridiques & commerciales auxquelles les industries créatives sont confrontées.
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IA et protection des droits d’auteur: les législateurs doivent s’adapter rapidement pour sauver leurs industries créatives
admin_Crefovi : 21/03/2023 3:36 : Antitrust & concurrence, Articles, Contentieux & résolution des litiges, Contentieux droits d'auteur, Droit de l'art, Droit de la musique, Droit du spectacle & médias, Internet & média digital, Jeux & loisirs, News, Propriété intellectuelle & contentieux PI, Sciences de la vie, Sport & esport, Technologies de l'information - hardware, software & services, Webcasts & podcastsLes technologies d’intelligence artificielle (‟IA”), qui se sont développées de manière exponentielle au cours des 5 dernières années, sont là pour rester et prospérer. La plupart des cadres juridiques, notamment français et américains, ne sont pas prêts pour ces avancées technologiques. En effet, la plupart des tribunaux refusent toujours d’accorder la protection et la propriété du droit d’auteur aux œuvres générées par l’IA, dans le monde entier. Cette situation n’est pas durable, car les outils et plateformes de génération d’IA remplaceront les méthodes traditionnelles de génération de contenu, dans un délai très court. Les cadres juridiques doivent donc s’adapter et céder, afin de s’assurer que leurs industries créatives nationales restent compétitives et en tête de classe. Comment cela peut il être accompli?
1. La révolution de l’IA: faire de l’IA la nouvelle norme
1.1. Les avancées technologiques de l’IA
Les technologies de l’IA se sont développées de manière exponentielle, en 2022, permettant de générer diverses productions créatives, dans le domaine littéraire, le secteur de la musique, les secteurs de l’art et de l’illustration, l’industrie du cinéma, la sphère des romans graphiques et l’industrie du jeu vidéo.
Par exemple, ChatGPT est un modèle de langage développé par OpenAI, un organisme de recherche spécialisé dans le développement de technologies d’IA de pointe, fondé en 2015. ChatGPT est basé sur l’architecture ‟Generative Pre-trained Transformer”(‟GPT”). Son objectif autoproclamé est de ‟fournir une assistance conversationnelle et de répondre à un large éventail de questions sur divers sujets, allant des informations factuelles aux opinions et conseils subjectifs”. Il peut être utilisé comme un puissant outil de recherche, en rédigeant des rapports de recherche extrêmement cohérents et détaillés, qui peuvent ensuite être insérés textuellement dans n’importe quel article, document de recherche ou blog.
Les outils d’écriture d’IA sont devenus monnaie courante et aident désormais les humains de diverses manières, afin d’écrire de meilleurs emails, blogs, articles et romans, de gérer le contenu des newsletters par email, de générer des plans SEO prêts à l’emploi, de générer des articles qui sont optimisés pour le référencement, etc.
Dans le domaine de la conception graphique, les outils d’IA peuvent produire des illustrations et dessins exceptionnels simplement en donnant des instructions écrites à des outils d’IA tels que Dall-E 2 (également créé par OpenAI), Midjourney et Stability.ai. Les résultats sont exceptionnels, comme le démontre la vitrine communautaire de Midjourney.
Ces illustrations et dessins peuvent, à leur tour, être utilisés pour créer des romans graphiques, comme ‟Zarya of the Dawn” de Kristina Kashtanova (généré avec Midjourney), des jeux vidéo, des couvertures de magazines, comme la couverture de ‟The Economist” et la couverture de Cosmopolitan pour son numéro sur l’AI, ou des films, comme ‟The Crow”, un court métrage généré avec CLIP d’OpenAI, et qui a remporté le Prix du Jury 2022 au Festival du court métrage de Cannes!
Dans le domaine de la musique, la musique générée par l’IA est de plus en plus répandue, avec des outils de composition musicale IA tels que MusicLM, un modèle générant de la musique haute fidélité à partir de descriptions textuelles du laboratoire de recherche Google, Riffusion, une IA qui compose de la musique en la visualisant, Dance Diffusion, le projet précédent de Google AudioLM et Jukebox d’OpenAI. Soundful, une plate-forme musicale d’intelligence artificielle assistée par l’homme, vise à répondre à la demande de musique au sein de la communauté des créateurs et de l’économie des créateurs de contenu. Au clic de quelques boutons, vous pouvez avoir la mélodie dont vous avez besoin pour votre projet.
1.2. Qui sont les principaux acteurs dans le domaine de l’IA?
Comme mentionné ci-dessus, OpenAI, est à la pointe de l’innovation en IA, avec de multiples outils d’IA créés pour être exploités sur divers supports créatifs tels que:
- la parole, via ChatGPT;
- les filmes, via CLIP;
- les illustrations, via Dall-E 2, et
- la musique avec Jukebox.
OpenAI a été fondée en 2015 par un groupe de personnalités éminentes de l’industrie technologique, dont Elon Musk, Sam Altman, Reid Hoffman, Ilya Sutskever, Peter Thiel, John Schulman et Wojciech Zaremba. Il s’agit d’un laboratoire de recherche américain sur l’IA composé de l’organisation à but non lucratif OpenAI Incorporated (OpenAI Inc.) et de sa filiale à but lucratif OpenAI Limited Partnership (OpenAI LP). L’objectif d’OpenAI est de créer une IA sûre et bénéfique ‟qui peut aider à relever certains des défis les plus urgents au monde” (sic). OpenAI est une organisation indépendante et ses recherches sont financées par un mélange de contributions philanthropiques, de partenariats d’entreprises et de subventions gouvernementales. L’organisation se ‟consacre à faire progresser la technologie de l’IA tout en promouvant la transparence, la collaboration et les considérations éthiques dans le développement et le déploiement de l’IA”.
En 2023, OpenAI a annoncé un partenariat avec Microsoft. Le 23 janvier 2023, Microsoft a annoncé un nouvel investissement pluriannuel de plusieurs milliards de dollars (qui s’élèverait à USD10 milliards) dans OpenAI. Puis, le 7 février 2023, Microsoft a annoncé qu’il intégrait une technologie d’intelligence artificielle basée sur la même base que ChatGPT dans son moteur de recherche web Bing, son navigateur web Edge, son logiciel de productivité Microsoft 365 et d’autres produits.
Google occupe également une place importante dans le secteur de la fabrication d’outils d’IA, en particulier avec ses outils d’IA générateurs de musique mentionnés ci-dessus, MusicLM et AudioLM. Le 6 février 2023, Google a annoncé une application d’IA similaire à ChatGPT (Bard, un chatbot d’IA conversationnel alimenté par le modèle linguistique de Google pour les applications de dialogue), après le lancement de ChatGPT, craignant que ChatGPT ne menace la place de Google en tant que source d’information incontournable. Google a également lancé Imagen, un ‟modèle de diffusion texte-image avec un degré de photoréalisme sans précédent et un niveau profond de compréhension du langage” (sic), pour concurrencer Dall-E.
Pour l’instant, l’impression générale des médias est que Google a pris du retard en matière d’IA, notamment par rapport à Microsoft et OpenAI.
2. Les défis juridiques d’AI
2.1. Les utilisateurs d’IA ont-ils des droits sur les créations?
La question de la paternité de l’IA est particulièrement importante, surtout si les acteurs de l’économie des créateurs de contenu l’adoptent.
La première étape consiste à revoir les termes et conditions de l’outil de génération d’IA, afin de clarifier qui possède quoi, en ce qui concerne l’oeuvre générée par l’IA.
Par exemple, pour utiliser les plateformes d’OpenAI, telles que Dall-E 2, Jukebox ou ChatGPT, l’utilisateur doit d’abord accepter les conditions d’utilisation d’OpenAI. Dans la version datée du 14 mars 2023 de ces CGU, il est précisé qu’OpenAI cède à l’utilisateur tous ses droits, titres et intérêts dans et sur les oeuvres générées et restituées par les services OpenAI sur la base de la saisie de l’utilisateur. Cela signifie que l’utilisateur peut utiliser le Contenu (défini comme l’‟input” et l’ ‟output” ensemble) à n’importe quelle fin, y compris à des fins commerciales telles que la vente ou la publication, si l’utilisateur respecte les conditions d’OpenAI. OpenAI peut utiliser le Contenu pour fournir et maintenir ses services, se conformer à la loi applicable et appliquer ses politiques. L’utilisateur est responsable du Contenu, y compris de s’assurer qu’il ne viole aucune loi applicable ou les conditions d’utilisation d’OpenAI.
Il s’agit d’une amélioration des conditions d’utilisation d’OpenAI qui étaient en vigueur avant le 14 mars 2023. Ces conditions indiquaient que les utilisateurs cédaient toute propriété qu’ils avaient sur toute sortie créée par le système et les services d’OpenAI, et, à leur tour, les utilisateurs avaient une licence exclusive pour utiliser l’oeuvre générée à quelque fin que ce soit. D’autres plateformes d’IA qui peuvent générer une oeuvre telles que Soundful, ont toujours des accords contractuels de droit d’auteur et de licence de ce type.
2.2. Qui est l’auteur de la sortie générée par l’IA?
Était-ce la personne qui a saisi l’invite de texte? Était-ce l’IA? Était-ce le développeur de l’IA ou la société propriétaire de l’IA?
La plupart des juridictions exigent qu’un être humain en soit l’auteur, et une œuvre ne peut être protégée par le droit d’auteur que si elle montre un effort intellectuel, de la créativité et reflète la personnalité de l’auteur.
Alors que les systèmes créatifs d’IA se généralisent, peut-on considérer qu’une invite textuelle, comme ‟un chat portant un turban regardant le paysage de la ville la nuit, depuis une fenêtre, dans le style de Van Gogh”, constitue suffisamment d’apport humain et d’individualité, et est suffisamment créative et reflète la personnalité de l’auteur humain pour permettre à l’image résultante d’être protégée par le droit d’auteur?
Par exemple, la législation britannique autorise la protection par le droit d’auteur des œuvres générées par ordinateur, l’auteur étant la personne qui a pris les ‟arrangements nécessaires” pour la création de l’œuvre conformément à l’article 9(3) de la loi de 1988 sur le droit d’auteur, les dessins et modèles et les brevets. D’autres rares juridictions prévoient expressément le droit d’auteur sur les œuvres générées par ordinateur, comme Hong Kong, l’Inde, l’Irlande, la Nouvelle-Zélande et l’Afrique du Sud.
Cependant, la plupart des pays, comme la France, refusent de reconnaître la protection du droit d’auteur si l’œuvre est générée par tout autre qu’un être humain. En effet, en application de l’article L. 112-1 du code de la propriété intellectuelle, ‟toute œuvre de l’esprit, quel que soit sa nature, sa forme d’expression, son mérite ou sa destination”, est susceptible d’être protégée par le droit d’auteur. Les tribunaux français reconnaissent l’originalité d’une création dès lors que ladite création est dotée de la personnalité de son auteur. Si le seuil de la condition d’originalité est bas, l’auteur d’une œuvre doit être une personne physique selon une jurisprudence bien établie. Il ne peut s’agir d’une personne morale, d’un animal ou d’un logiciel. La justification de cette position est que le droit français ne protège que les œuvres de l’esprit et que les créations en cause doivent porter l’empreinte de la personnalité de leur(s) auteur(s); les personnes morales, les animaux et les IA n’ont ni conscience ni personnalité pouvant découler des œuvres qu’ils créent.
À maintes reprises, le ‟United States Copyright Office” (« USCO« ), qui est chargé d’enregistrer les œuvres pour la protection du droit d’auteur aux États-Unis, a refusé d’accorder la protection du droit d’auteur au contenu généré par l’IA, tel que:
- une image créée de manière autonome par un algorithme informatique intitulé ‟Une entrée récente au paradis”, que Steven Thaler, le PDG d’Imagination Engines, Inc. avait demandé à l’USCO d’enregistrer dans le cadre de sa candidature datée du 3 novembre 2018, et
- le roman graphique mentionné ci-dessus ‟Zarya of the Dawn”, parce que les images générées par Midjourney, contenues dans l’œuvre, ne sont ‟pas des œuvres originales de l’auteur protégées par le droit d’auteur” (sic) et que les ‟invites de texte” sont insuffisantes pour être qualifiées de ‟paternité humaine”.
Étant donné que la protection du droit d’auteur est automatiquement accordée en France, contrairement aux États-Unis où la protection du droit d’auteur est accordée uniquement lors de l’enregistrement de l’USCO, aucune jurisprudence de ce type n’existe en France ou dans d’autres pays européens. Il faudra attendre encore quelques années, avant qu’un litige en contrefaçon de droit d’auteur, relatif à des contenus générés par l’IA, n’atterrisse devant les tribunaux européens (à l’exception notable de l’assignation déposée par le fournisseur d’images Getty Images, contre Stability.ai, pour violation du droit d’auteur, auprès de la Haute Cour de Londres, Royaume-Uni).
Compte tenu de l’absence d’œuvre de l’esprit et du manque d’originalité d’une production issue exclusivement d’une IA, de telles créations sont donc aujourd’hui dans le domaine public et aucun droit de propriété intellectuelle ne leur est attaché (à l’exception notable, précitée, du régime applicable au Royaume-Uni, à Hong Kong, en Irlande, en Inde, en Nouvelle-Zélande et en Afrique du Sud, qui permet la protection par le droit d’auteur des œuvres générées par ordinateur, l’auteur étant la personne qui a pris les ‟arrangements nécessaires” pour la création de l’œuvre).
2.3. Comment la loi peut-elle aborder de manière adéquate l’IA, afin de la rendre bénéfique pour les industries créatives?
En France, le Conseil Supérieur de la Propriété Littéraire et Artistique, un organe consultatif indépendant conseillant le ministère français de la culture et de la communication dans le domaine de la propriété littéraire et artistique, a formulé des recommandations dans un rapport daté du 27 janvier 2020. Il suggère qu’un droit ‟sui generis” pourrait être créé au profit de celui qui supporte les risques de l’investissement, à l’instar du régime spécifique dont bénéficient les producteurs de bases de données.
Le Parlement européen, de l’Union européenne (‟UE”), a également suggéré qu’une personnalité juridique soit reconnue à l’IA, afin que la protection du droit d’auteur soit accordée aux œuvres générées par l’IA.
Pour l’instant, aucune des recommandations ci-dessus n’a été reprise par le législateur français et/ou européen.
La Commission européenne (‟CE”) a proposé un test en quatre étapes afin d’évaluer si la sortie générée par l’IA peut être considérée comme une œuvre protégée dans le cadre actuel du droit d’auteur de l’UE, comme suit:
- première étape: la production générée par l’IA doit être une production dans le domaine littéraire, scientifique ou artistique (article 2(1) de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques);
- deuxième étape: l’oeuvre générée par l’IA doit être le résultat d’un effort intellectuel humain (c’est-à-dire une sorte d’intervention humaine telle que, par exemple, le développement d’un logiciel, l’édition ou la collecte ou le choix de données d’entraînement);
- troisième étape: l’oeuvre générée par l’IA doit être originale, et
- quatrième étape: l’œuvre doit être identifiable avec suffisamment de précision et d’objectivité (c’est-à-dire que le résultat généré sera conforme à l’intention d’auteur générale du créateur).
Il est flagrant que les disparités actuelles dans les différents systèmes et cadres juridiques, où un ensemble de cadres juridiques nationaux s’oppose fortement à l’octroi de la protection du droit d’auteur au contenu généré par l’IA, tandis que l’autre ensemble de cadres juridiques nationaux englobe pleinement le contenu généré par l’IA et lui accorde une protection complète de droit d’auteur, créera des inégalités de traitement substantielles pour les créateurs de contenu dans le monde entier.
En effet, les créateurs de contenu basés au Royaume-Uni, en Irlande ou en Inde sont incités à accélérer leur flux de travail, en adoptant pleinement les outils et programmes générateurs d’IA permettant de gagner du temps, dont les résultats pourront revendiquer la propriété et la protection du droit d’auteur. Pendant ce temps, les créatifs basés en France ou aux États-Unis auront sérieusement du mal à faire respecter tout type de protection du droit d’auteur et de droits sur le contenu généré par l’IA. Ainsi, les créateurs de contenus français et américains préféreront s’en tenir aux ‟anciennes méthodes” de création d’œuvres, refusant d’utiliser des plateformes d’IA dont la production tombera automatiquement dans le domaine public.
Cette situation ne peut pas perdurer, et puisque l’IA est là pour rester – c’est certain – les législateurs et juges têtus, tels que l’USCO qui a récemment publié des directives bornées sur les enregistrements de droits d’auteur impliquant l’IA, devront inévitablement céder et se réformer, afin accorder la protection du droit d’auteur aux œuvres générées par l’IA.
Bien sûr, les lobbies et les organisations représentant la musique et d’autres disciplines créatives essaieront de retarder l’inévitable, en mettant en place des campagnes insensées et des complots de lobbying, comme la ‟Human Artistry Campaign”, pour empêcher les instituts de protection du droit d’auteur et les tribunaux de conclure que les œuvres générées par l’IA sont protégées par le droit d’auteur.
Mais les vannes sont maintenant ouvertes. Et il n’y a pas de retour en arrière: les avancées et sauts technologiques que fournissent les outils et plateformes générant de l’IA sont si importants et révolutionnaires que l’économie du contenu créatif et les parties prenantes créatives les adopteront pleinement dans les prochains mois, sans jamais regarder en arrière.
Les législateurs doivent s’adapter rapidement, afin de maintenir leurs économies créatives et leurs acteurs à la pointe de la concurrence.
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Enquête de fusion de la CMA sur l’acquisition par Sony d’AWAL & KNR de Kobalt
admin_Crefovi : 07/03/2023 9:34 : Antitrust & concurrence, Appels d'offres non sollicités, Articles, Droit de la musique, Droit du spectacle & médias, Fusions & acquisitions, Internet & média digital, Liquidations & redressements judiciaires, News, Prises de contrôle hostiles, Private equity & private equity finance, Restructurations, Technologies de l'information - hardware, software & services, Webcasts & podcastsL’autorité de la concurrence et des marchés britannique (‟CMA”) a fait un travail remarquable, avec les informations et les données qui lui ont été fournies, au cours des enquêtes de phase 1 et de phase 2 de l’acquisition par Sony des actifs de Kobalt, AWAL et Kobalt Neighboring Rights. Pourquoi cette enquête sur la fusion est-elle importante pour l’industrie de la musique? Comment est-ce arrivé? L’issue de l’enquête de fusion était-elle juste et appropriée, pour préserver une saine concurrence dans les secteurs de la distribution musicale et de la gestion des droits musicaux?
Liberté d’expression dans les industries créatives: comment tout cela a-t-il pu si mal tourner?
admin_Crefovi : 09/02/2023 4:19 : Articles, Contentieux & résolution des litiges, Contentieux droits d'auteur, Droit de l'art, Droit de la musique, Droit du spectacle & médias, Droit du travail, avantages sociaux & rémunérations, Internet & média digital, News, Propriété intellectuelle & contentieux PI, Technologies de l'information - hardware, software & services, Webcasts & podcastsAlors que la ‟cancel culture” et les ‟culture wars” sont des attaques contre la liberté d’expression et la liberté de la presse venant d’en bas, la virulence de la dernière attaque contre la liberté de la presse et de l’expression créative vient désormais d’en haut. Les États, les structures gouvernementales, les entreprises publiques et privées, les oligarques ainsi que d’autres ploutocrates utilisent tous les outils juridiques à leur disposition, et plus encore, pour faire taire, intimider et neutraliser toute personne susceptible de formuler ne serait-ce qu’une critique à leur sujet, leurs comportements, leurs actions et leurs antécédents. Les industries créatives sont particulièrement ciblées par ces approches autoritaires ‟top down” et ces tactiques juridiques visant à ternir leurs productions et leurs œuvres créatives, malgré les protections juridiques offertes par le droit d’auteur.
Le capital-investissement va à Hollywood: quand investir dans la production de contenu média est devenu à la mode
admin_Crefovi : 28/12/2022 8:00 : Articles, Banque & finance, Droit du spectacle & médias, Droit immobilier, Fusions & acquisitions, Internet & média digital, Jeunes pousses & startups, Marchés de capitaux, News, Private equity & private equity finance, Sport & esport, Technologies de l'information - hardware, software & services, Webcasts & podcastsMême en période de ralentissement, l’argent du capital-investissement choisit Hollywood comme un pari intelligent. Les sociétés d’investissement considèrent désormais les bannières de production axées sur les stars (et les principales scènes sonores) comme un jeu à long terme sur un marché de contenu encombré. Comment est-ce arrivé? Pourquoi ce revirement soudain, alors que les financiers avaient toujours considéré auparavant qu’investir dans la production de contenu médiatique était au mieux un pari très risqué? Cette stratégie d’investissement ‟all in” dans la production de contenus médias, mise en œuvre par des fonds de ‟private equity”, est-elle financièrement saine?
Les ‟loot boxes” dans les jeux vidéo: autorégulation ou législation, telle est la question
admin_Crefovi : 30/11/2022 12:18 : Antitrust & concurrence, Articles, Droit du spectacle & médias, Internet & média digital, Jeux & loisirs, News, Sport & esport, Technologies de l'information - hardware, software & services, Webcasts & podcastsÀ la suite de la débâcle de Star Wars Battlefront 2 en 2017, de nombreux régulateurs européens, y compris britanniques et français, ont commencé à adopter une position de plus en plus scrutatrice et jugeante, sur les ‟loot boxes” proposées à l’achat aux enfants et aux jeunes qui jouent à des jeux vidéo. Pourquoi les ‟loot boxes” sont-elles potentiellement dangereuses? Que font les régulateurs britanniques et français – et d’autres gouvernements dans le monde – pour protéger les joueurs vulnérables de ces mécanismes de récompense aléatoires?
1. Que sont les ‟loot boxes”?
1.1. Définition
Les boîtes à butin sont un phénomène relativement récent, entrant dans le discours public vers 2006. Il est prouvé que l’utilisation du terme ‟boîte à butin” (‟loot box”) s’est développée à partir du phénomène plus général des ‟Mécanismes de Récompense Aléatoire” (‟Random Reward Mechanisms”) (‟RRMs”) qui ont été utilisés dans les jeux depuis le début des années 1990. Les RRMs fonctionnent de la même manière que d’autres formes de hasard, telles que les cartes à collectionner et les œufs Kinder, et remontent aux cartes à cigarettes du 19e siècle.
Les RRMs sont basés sur le principe des produits ‟gratuits” souhaitables contenus dans un autre produit qui est vendu et la nature du ‟jeu” repose sur des achats aveugles d’articles aléatoires. En utilisant les cartes à collectionner comme exemple, les acheteurs continuent de payer pour des cartes dans l’espoir de trouver les cartes particulières qu’ils veulent. Le marché de ces biens fonctionne avec une asymétrie d’information: les vendeurs contrôlent la disponibilité, ne publient pas de statistiques de probabilité et capitalisent sur les désirs des acheteurs.
Alors que ces antécédents de boîtes à butin sont établis et acceptent le hasard comme élément de jeu dans les jeux de hasard physiques et virtuels, la recherche indique que ‟les jeux vidéo placent des objets aléatoires dans des coffres au trésor depuis des décennies”.
Par conséquent, le caractère aléatoire de la récompense est la principale caractéristique distinctive des boîtes à butin autour desquelles toutes les définitions s’accordent.
En termes de distinction et de classification des ‟loot boxes”, la division se concentre sur le mécanisme de récompense. Les principaux facteurs de distinction dans les définitions sont:
- type: cosmétique (personnalisation, par exemple l’apparence du personnage ou de l’avatar du joueur) versus amélioration intégrale/du jeu (par exemple outils, armes, cartes, ‟super pouvoirs”);
- monnaies utilisées: argent virtuel versus réel (le coût des ‟loot boxes” variant de quelques euros (1 à 2 euros) à 100 euros voire plus);
- ubiquité: populaire contre niche;
- accès: récompense pour avoir bien joué au jeu ou récompense pour un ‟gameplay” soutenu (avec le coût des ‟loot boxes” allant de certains ‟gameplays” – comme finir un niveau, par exemple – à des ‟gameplays” lourds – plusieurs heures – et souvent répétitifs – appelé ‟grinding”), et
- exclusivité: le joueur n’a pas d’autre moyen d’acquérir des objets que de dépenser de l’argent.
Les RRM ont été conceptualisés en quatre types, en fonction de l’offre des joueurs Ressources par rapport à la Récompense potentielle. Ceux-ci peuvent être soit (I) Isolées de, soit (E) Intégrées (‟Embedded”) à l’économie du monde réel. Cela conduit à quatre types de ‟loot boxes”:
- I-I non achetables et non vendables, RRM dans les jeux solo (par exemple Diablo I);
- I-E non achetables mais vendables, RRM échangeables (par exemple Diablo III);
- E-I achetables mais non vendables, RRM qui peuvent être achetés mais pas échangés (ex. Overwatch);
- E-E achetables et échangeables, RRM pouvant être achetés et échangés dans des jeux multijoueurs (par exemple, Team Fortress 2, CS:GO et PlayerUnknown’s Battlegrounds).
Alors que certains chercheurs considèrent que seules les boîtes à butin de type E-E peuvent être considérées comme des jeux d’argent, d’autres, comme Leon Xiao, se sont opposés à cette position, pointant vers l’affaire FutGalaxy.com. Dans ce dossier, un site web tiers signifiait que les devises et les récompenses du jeu qui étaient isolées par conception pouvaient en fait être échangées (ce qui les rend effectivement intégrées, dans ce cas).
Les boîtes à butin sont donc une forme de microtransactions où elles sont disponibles en tant qu’achat dans le jeu. Cependant, les ‟loot boxes” ne représentent qu’une partie du marché des achats en jeu. Leur élément unique est le mécanisme de changement. Pour les autres formes d’achats dans le jeu, les joueurs sauront quel article ils recevront avant l’achat.
1.2. Échelle et portée du marché des ‟loot boxes” et des microtransactions
En 2021, il y avait 2,96 milliards de joueurs dans le monde, générant des revenus de USD189,3 milliards en 2020 pour les cinq principales entreprises (Tencent, Sony, Microsoft, Apple et Activision Blizzard), représentant 43 pour cent des revenus mondiaux des jeux. Les jeux vidéo sont l’un des secteurs du divertissement à la croissance la plus rapide, avec des prévisions d’un taux de croissance annuel composé d’environ 10 pour cent, sur la période 2022-2030.
Dans ce contexte, les ‟loot boxes” et les microtransactions sont très lucratives. Les revenus générés par les ‟loot boxes” utilisées dans les jeux vidéo dépasseront USD20 milliards en 2025, contre USD15 milliards en 2020.
Pas étonnant que de grands studios (ex. Activision Blizzard et Electronic Arts) aient breveté leurs mécanismes de ‟loot box” pour lutter contre l’imitation!
Comme expliqué dans notre article sur l’acquisition d’Activision Blizzard par Microsoft, les gamers accèdent aux jeux vidéo de trois manières:
- ils peuvent acheter le jeu à un prix fixe (ce modèle de prix d’achat premium est le modèle commercial le plus traditionnel, toujours utilisé pour les franchises Grand Theft Auto V et Assassin’s Creed);
- ils peuvent s’abonner, sur une base mensuelle (parfois annuelle) pour accéder à un jeu (World of Warcraft de Blizzard Entertainment est peut-être le jeu le plus réussi qui utilise ce modèle d’abonnement); ou
- ils téléchargent des jeux qui sont gratuits, mais peuvent avoir à exécuter des microtransactions afin d’obtenir des éléments de contenu discrets (par exemple, un joueur peut dépenser un dollar sur une nouvelle épée pour un personnage, ou sur un élément de vanité comme changer la couleur des cheveux de leur personnage, comme dans le jeu PC le plus populaire au monde – League of Legends de Riot Games – qui vend une variété d’articles permettant de personnaliser le jeu de base, qui, lui-même, est offert gratuitement).
C’est dans le troisième et dernier scénario, le modèle de distribution freemium, construit autour des microtransactions comme source de revenus, que les ‟loot boxes” prospèrent. Le jeu est téléchargé à partir de plateformes numériques telles que l’App Store, Google Play ou Steam, la plupart des joueurs ne dépensant aucun argent pour jouer au jeu. Les boîtes de butin sont insérées dans les jeux freemium en tant que mécanisme pour les achats intégrés. Même si les joueurs ne souhaitent pas accéder aux boîtes à butin, ils ne peuvent pas éviter d’être exposés à ces fonctionnalités du jeu: ils se verront constamment rappeler la possibilité de se prévaloir des récompenses aléatoires contenues dans les boîtes à butin.
1.3. Les ‟loot boxes” sont-elles incluses dans la définition de ‟jeu d’argent” en vertu de la loi britannique sur les jeux de hasard de 2015 et de la loi française du 12 mai 2010?
Non, les boîtes à butin ne sont pas légalement considérées comme des jeux d’argent au Royaume-Uni et en France.
Des inquiétudes ont été exprimées quant à savoir si l’achat de ‟loot boxes” est comme un ‟jeu de hasard” et donc une forme de jeu d’argent (‟gambling”). Des inquiétudes particulières ont été soulevées concernant les boîtes à butin dans les jeux vidéo destinés aux enfants ou aux jeunes.
En 2016, la Gambling Commission britannique a identifié les ‟loot boxes” comme un risque potentiel pour les enfants, dans le cadre d’un examen plus large des jeux et des paris. La Gambling Commission a, par la suite, déclaré que la question de savoir si elle avait le pouvoir d’intervenir sur le marché des coffres à butin dépendait de la question de savoir si une activité particulière était considérée comme un jeu de hasard joué pour ‟de l’argent ou la valeur de l’argent” en vertu des dispositions pertinentes de la loi britannique de 2005 (‟Gambling act 2015”) sur les jeux de hasard. La Commission a déclaré que ‟lorsque les objets du jeu obtenus via des boîtes à butin sont confinés à une utilisation dans le jeu et ne peuvent pas être encaissés, il est peu probable qu’ils soient considérés comme une activité de jeu d’argent sous licence. Dans ces cas, nos pouvoirs juridiques ne nous permettraient pas d’intervenir”.
La même conclusion a été tirée par l’Autorité de régulation des jeux en ligne (‟ARJEL”), dans son rapport d’activité 2017-2018, concluant que les ‟loot boxes” (à l’exception des ‟loot boxes” de type E-E, comme dans les jeux PlayerUnknown’s Battlegrounds, Team Fortress 2 et Counter-Strike: Global Offensive, qui avaient déjà fait l’objet d’enquêtes, et en grande partie résolues par l’ARJEL, d’autres régulateurs et l’industrie du jeu) sortaient du champ d’application de la loi française du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur d’argent en ligne et de jeux de hasard.
Ainsi, pour les régulateurs français et britanniques des jeux d’argent, les jeux les plus cités dans le débat sur les ‟loot boxes” (Overwatch, Star Wars Battlefront 2 et FIFA Ultimate Team) appartiennent au type E-I (RRMs achetables mais non vendables) et donc ne ne répondent pas à la définition légale des jeux de hasard.
Cependant, tous les pays européens n’ont pas emprunté cette voie, la Belgique et les Pays-Bas ayant statué que la vente de ‟loot boxes” dans certaines circonstances est une forme de jeu en vertu de leur législation nationale sur les jeux. La Slovaquie considère également les boîtes à butin comme des jeux de hasard selon sa définition légale nationale, mais n’a pas encore pris de mesures réglementaires. Plus récemment, l’Espagne s’est engagée à introduire une nouvelle législation pour restreindre la vente des boîtes à butin.
Fait intéressant, les institutions de l’Union européenne (‟UE”), et, en particulier, la Commission européenne, ont refusé de prendre des mesures ciblées importantes pour aborder le sujet des ‟loot boxes” parce que l’UE a peu de compétence dans le domaine des jeux d’argent, car cette compétence incombe principalement aux états-membres de l’UE.
Ainsi, en France, au Royaume-Uni, mais aussi au Danemark, en Finlande, en Suède et dans les autres états-membres de l’UE (à l’exception de la Belgique, des Pays-Bas, de la Slovaquie et de l’Espagne), les ‟loot boxes” sont régies par la législation nationale générale sur les contrats et la protection des consommateurs.
2. Pourquoi les ‟loot boxes” sont-elles un problème dans l’état actuel des choses?
Un scandale a éclaté en novembre 2017, lorsque le studio de jeux EA a suspendu les microtransactions dans Star Wars Battlefront 2 à la suite d’une vague de fureur concernant les boîtes à butin, quelques heures avant le lancement du jeu. Alors que d’autres développeurs et éditeurs de jeux avaient été mêlés à la controverse sur les boîtes à butin, EA a subi la majorité de l’énervement, en raison du déséquilibre potentiellement causé par le butin aléatoire, dans ce jeu de tir multijoueur compétitif.
C’est à ce moment-là que de plus en plus d’autorités nationales de jeu, et de gouvernements, ont commencé à prendre très au sérieux les problèmes potentiellement causés par les ‟loot boxes” et ont lancé des enquêtes.
De plus, une étude publiée en 2020 a recensé les 100 jeux les plus rentables sur le Google Play Store et l’App Store. Il a révélé que 58 pour cent des jeux Google et 59 pour cent des jeux iPhone contenaient des boîtes à butin. Parmi ceux qui contenaient des ‟loot boxes”, 93 pour cent des jeux Google et 95 pour cent des jeux iPhone étaient disponibles pour les enfants de 12 ans et plus. Ainsi, les boîtes à butin sont extrêmement courantes dans les jeux freemium.
De plus, les boîtes à butin deviennent encore plus attrayantes pour les joueurs, car les marques de mode haut de gamme et les marques de luxe, telles que Gucci, Burberry et Nike, s’associent à des éditeurs de jeux vidéo pour offrir aux joueurs des options cosmétiques et de personnalisation d’avatar encore plus attrayantes et à la mode. Il est donc encore plus difficile de résister, pour les jeunes soucieux de mode, aux opportunités d’acheter des boîtes à butin contenant des articles de créateurs de mode, sur leur jeu préféré.
En septembre 2019, la commission du numérique, de la culture, des médias et des sports de la Chambre des communes britannique (‟DCMS”) a publié son rapport ‟Immersive and addictive technologies”. Le rapport détaille les préjudices financiers associés aux jeux en ligne, y compris les comportements de type ‟jeux d’argent” (‟gambling”) qui peuvent affecter certains utilisateurs, en particulier ceux appartenant à des groupes d’âge vulnérables comme les enfants et les jeunes. DCMS a entendu des témoignages indiquant qu’il existait ‟des similitudes structurelles et psychologiques entre les coffres à butin et les jeux d’argent”. Le rapport recommandait que les boîtes à butin contenant l’élément de chance ne soient pas vendues aux enfants qui jouent à des jeux, et que les crédits de jeu soient plutôt gagnés grâce aux récompenses gagnées en jouant aux jeux.
3. Que font le Royaume-Uni et la France pour limiter les dégâts causés par les ‟loot boxes”?
Cela a incité le gouvernement britannique à lancer un appel à témoignages en septembre 2020, et à la révision plus large de la loi sur les jeux de hasard de 2005 (‟gambling act 2005”) en décembre 2020. Le résultat de la consultation de l’appel à témoignages a été publié en juillet 2022 avec le message principal transmis par le gouvernement britannique, à l’industrie du jeu, étant qu’elle doit s’autoréguler et prendre des mesures sur les boîtes à butin, ou risquer une future législation. Dans une démarche typique du partie politique conservateur (‟Tories”), la conclusion de la consultation était que l’amélioration des protections dirigées par l’industrie était la meilleure approche, par rapport à la réglementation en vertu d’une version modifiée de la loi sur les jeux de hasard de 2005 (qui classerait les boîtes à surprises comme des jeux de hasard) et d’autres protections légales des consommateurs. Dans le cadre de ces protections améliorées dirigées par l’industrie, la fédération de l’industrie des jeux vidéo Ukie et ses membres doivent aller plus loin, et davantage doit être fait sur les plateformes de jeux, et par les éditeurs, pour atténuer le risque de dommages causés par les boîtes à butin, tandis que les achats de ‟loot boxes” ne devraient pas être disponibles pour tous les enfants et les jeunes à moins et jusqu’à ce qu’ils soient habilités par un parent ou un tuteur.
Ainsi, le point de vue du DCMS, énoncé dans sa conclusion de juillet 2022 à l’appel à témoignages, est qu’il serait prématuré de poursuivre la voie de la législation, en ce qui concerne les ‟loot boxes”, sans rechercher d’abord des protections renforcées dirigées par l’industrie. Et convoquer un groupe de travail technique pour poursuivre ces mesures améliorées dirigées par l’industrie afin d’atténuer le risque de dommages causés par les boîtes à butin dans les jeux vidéo. Le groupe de travail technique comprendrait des représentants des sociétés et des plateformes de jeux, des ministères et des organismes de réglementation.
Parmi les membres de ce groupe de travail technique figure Leon Xiao, mentionné ci-dessus, un doctorant spécialisé dans les ‟loot boxes” et le droit des jeux vidéo.
Dans un article séminal, L. Xiao critique l’interdiction des ‟loot boxes” en Belgique comme étant inefficace, car, même si la Belgique a techniquement ‟interdit” les boîtes à butin en utilisant sa loi sur les jeux d’argent en 2018, 82 pour cent des jeux iPhone les plus rentables sur l’App Store belge ont continué à monétiser à l’aide de ‟loot boxes” en 2022. En effet, le régulateur belge n’a pas activement appliqué la loi en raison d’un manque de ressources et de pouvoir d’application. Par conséquent, tout cadre d’autorégulation devrait être soutenu par des mécanismes d’application efficaces, avec un organisme indépendant mis en place pour examiner les actions de conformité des éditeurs de jeux et infliger des sanctions (telles que des amendes et des sanctions financières) en cas de non-conformité. Le financement de cette tâche de mise en vigueur pourrait être obtenu par le biais d’un prélèvement obligatoire sur l’industrie du jeu.
L. Xiao suggère également que l’autoréglementation britannique sur les ‟loot boxes” implique la création d’un ‟code de conduite” au sens du règlement 2(1) des ‟Consumer Protection from Unfair Trading Regulations 2008”. Cela impliquerait que tout manquement à se conformer avec des engagements d’autorégulation vérifiables, explicitement énoncés dans ce code de conduite, par une entreprise signataire, pourrait faire l’objet de poursuites judiciaires. Cette combinaison de flexibilité, d’engagement de l’industrie envers l’autorégulation et de pouvoirs d’exécution grâce aux réglementations légales britanniques serait idéale, selon L. Xiao.
Un autre outil pour améliorer l’autorégulation serait d’exiger des divulgations obligatoires de probabilité des ‟loot boxes”, comme celles requises en Chine. En effet, la Chine exige des plateformes de jeux vidéo qu’elles divulguent les probabilités d’obtenir des objets aléatoires à partir de boîtes à butin depuis 2017. Seuls 64 pour cent des jeux contenant des ‟loot boxes” divulguent des probabilités sur l’App Store britannique, contre 95,6 pour cent sur la boutique chinoise. Bien qu’Apple ait des directives d’auto-régulation de l’App Store qui stipulent que les divulgations de probabilité de boîte à butin doivent être faites, Apple n’a pas activement appliqué cette exigence de divulgation de probabilité d’autorégulation. Cela devrait changer selon L. Xiao et ne pas divulguer les probabilités devrait entraîner le retrait des jeux du magasin. En outre, ces divulgations de probabilités devraient être suffisamment visibles et facilement accessibles aux joueurs, et les mesures d’autorégulation du Royaume-Uni devraient englober des normes minimales à l’échelle de l’industrie que toutes les entreprises doivent respecter à cet égard.
Une mesure d’autorégulation qui a été uniformément appliquée est le label PEGI ‟Inclut des éléments aléatoires payés” (‟Includes paid random items”). Le fournisseur européen de système de classification du contenu des jeux vidéo PEGI le joindrait à tous les jeux contenant des ‟loot boxes” pour ‟fournir des informations supplémentaires” aux joueurs et aux parents. Mais le label PEGI semble inefficace car il n’informe pas les joueurs et les parents sur la façon exacte dont le mécanisme de la boîte à butin peut être identifié afin de permettre aux joueurs et aux parents d’éviter de s’y engager. Par conséquent, une amélioration serait de décrire spécifiquement le mécanisme de la boîte à butin dans le jeu et de fournir un choix dans le menu des options pour activer ou désactiver la possibilité d’acheter des boîtes à butin (potentiellement même avec l’option par défaut désactivée).
Alors que le Royaume-Uni tente de trouver le meilleur moyen de forcer l’industrie du jeu vidéo à s’autoréguler sur les ‟loot boxes” et les microtransactions, et que la France a complètement perdu le fil sur le sujet, l’Australie a déposé un projet de loi sur les boîtes à butin le 28 novembre 2022, avec sa proposition de législation exigeant que les jeux avec des coffres à butin soient classés R18 + et comportent des avertissements pour les parents, afin d’empêcher les enfants d’acheter et de jouer à des jeux avec des coffres à butin.
Il s’agit d’un avertissement sévère aux sociétés de jeux vidéo qu’elles doivent changer leurs habitudes, rapidement, afin de travailler avec les gouvernements et, en particulier, le gouvernement britannique, pour mettre en œuvre des mesures d’autorégulation efficaces et strictement appliquées pour éviter toute exploitation psychologique et financière supplémentaire des enfants et des jeunes via des ‟loot boxes”. J’ai bon espoir que les éditeurs de jeux ont compris le message puisque de nombreux grands studios, tels qu’Activision Blizzard, Electronic Arts, Ubisoft et First Touch Games, ainsi que l’association professionnelle représentant l’industrie britannique du jeu TIGA, ont soumis des preuves durant l’appel à témoignages de 2020 mentionné ci-dessus. Continuons à monitorer cette situation, et voyons si les sociétés de jeux vidéo sont à la hauteur du défi et peuvent proposer des mesures d’autorégulation décisives, qui seront appliquées à l’échelle de l’industrie, au Royaume-Uni et au-delà.
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Dans deux de mes articles précédents, j’ai postulé que la prochaine guerre, dans l’espace du streaming musical, serait entre les artistes interprètes et les maisons de disques, se battant devant les tribunaux pour savoir si un stream musical est une vente, une licence ou une location.
En effet, dans ‟Méthodes modernes de monétisation pour les labels de musique indépendants et les majors: 360° et au-delà”, publié en février 2016, j’ai indiqué que ‟les revenus numériques étant le domaine de revenus de la musique qui connaît la croissance la plus rapide et la plus exponentielle, il est probable que de plus en plus plus de groupes de musique soient attirés par l’option d’accord de profit net, qui assure une répartition 50-50 des revenus de streaming et de téléchargement, plutôt que l’option traditionnelle d’accord d’enregistrement”. ‟Des artistes du disque, tels qu’Eminem et ‟Weird Al” Yankovic, ainsi que des managers, tels que 19 Entertainment fondé par le magnat de la musique Simon Fuller, ont rapidement porté cette question relative à la répartition des revenus sur les revenus numériques à l’attention du grand public, en entamant des poursuites judiciaires très médiatisées contre les trois majors de la musique. Les défendeurs ont ensuite transigé ces poursuites à l’amiable, consentant – sous des conditions confidentielles – à augmenter la part des revenus des artistes sur les revenus numériques, mais leur réputation a été ternie dans le processus”.
Plus récemment, dans ‟Réformer la loi britannique sur la musique: rendre le marché du streaming musical économiquement viable pour toutes les parties prenantes”, j’ai souligné que le débat, soulevé par la ‟House of Commons Digital, Culture, Media and Sport Committee” du Royaume-Uni ( la ‟Commission”), lors de son enquête de 2020, pour savoir si un stream musical était une vente, une licence ou une location, est considéré par des commentateurs américains, comme Susan Butler de ‟Music Confidential”, comme un moyen de manipuler les maisons de disques de partager 50 pour cent des redevances de diffusion en continu dans le cadre d’accords d’enregistrement existants, conclus avec des artistes interprètes il y a longtemps. Ces anciens contrats d’enregistrement stipulent que les redevances des artistes sont calculées en pourcentage des ventes mais, pour les licences, une part de 50 pour cent des droits de licence est perçue par les artistes interprètes. Si un stream n’est pas classé comme une vente, mais comme une licence, les maisons de disques devraient partager 50 pour cent de leurs revenus de streaming avec les artistes, même en vertu d’anciens accords.
Les labels et les artistes du disque se sont donc battus, et se battent toujours, pour déterminer si le streaming musical remplace la radio ou les ventes (c’est-à-dire les ventes de CD, de cassettes, de vinyles). Au début de l’ère du streaming, et avant cela, les labels payaient généralement les artistes sur la base d’un stream (ou d’un téléchargement numérique) constituant une vente. Pourquoi les labels traitent-ils le plus souvent le streaming comme des ventes (ce qui est plutôt contre-intuitif puisque le streaming est une question d’‟accès” plutôt que de ‟propriété”)? Parce que le pourcentage que les labels devraient payer aux artistes sur les streams musicaux est beaucoup plus faible, souvent dans la fourchette de 10 à 15 pour cent si l’artiste est signé sur un contrat d’enregistrement traditionnel ou 360 (et classe donc les streams comme des ventes), plutôt qu’environ 50 pour cent pour une licence.
Eh bien, ma participation à la conférence annuelle 2022 du juge Richard Arnold, auprés de la Westminster Law School, en février 2022, a attiré mon attention sur une nouvelle affaire judiciaire, gérée et jugée par le Tribunal de la propriété intellectuelle britannique (‟Intellectual Property Enterprise Court”) (‟IPEC”), qui se rapporte exactement à ce débat, faisant rage, entre labels de musique et artistes-interprètes.
Sauf que, contrairement aux procédures judiciaires susmentionnées qui ont toutes été réglées à l’amiable et de manière confidentielle, cette nouvelle affaire judiciaire britannique, intitulée Kieran Hebden v Domino Recording Co Limited [2022] EWHC 74 (IPEC), s’est déroulée devant la place publique.
1. Quels sont les faits?
Kieran Hebden est un artiste musical britannique qui se produit et enregistre sous le nom de ‟Four Tet” (le ‟Demandeur”).
Le 28 février 2001, le Demandeur et Domino Recording Company Limited, une maison de disques indépendante du Royaume-Uni (le ‟Défendeur”), ont conclu un contrat d’enregistrement exclusif (le ‟Contrat”).
En vertu du Contrat, le Demandeur:
- s’est engagé à fournir certains enregistrements sonores, exclusivement au Défendeur, dans un délai déterminé, sous le nom de ‟Four Tet” (les ‟Masters”), et
- a cédé le droit d’auteur sur les Masters au Défendeur.
En vertu du Contrat, le Défendeur s’est engagé à:
- diffuser les Masters, et
- comptabiliser, et payer au Demandeur, les redevances relatives aux Masters.
Les stipulations d’enregistrement exclusif du Contrat ont pris fin en novembre 2005.
Entre février 2001 et novembre 2005, je comprends que les Masters fournis par le Demandeur au Défendeur, et diffusés par le Défendeur, étaient: Pause (2001), Rounds (2003) et Everything Ecstatic (2005).
2. Quelle est la procédure de l’affaire?
Probablement après quelques tentatives infructueuses de règlement à l’amiable avec le Défendeur, le Demandeur a assigné en justice le Défendeur, devant l’IPEC, le 16 décembre 2020 (l’ ‟Assignation”).
Dans l’Assignation, le Demandeur a soutenu que le Défendeur avait violé ses obligations contractuelles en vertu du Contrat, en particulier en ne comptabilisant pas correctement les redevances relatives aux streams et téléchargements numériques. Le demandeur a demandé une déclaration sur la véritable interprétation du Contrat, et des dommages et intérêts plafonnés à GBP70.000.
En d’autres termes, le Demandeur requérait, dans l’Assignation, que le Défendeur lui verse 50 pour cent des redevances relatives aux Masters, découlant du streaming et des téléchargements numériques, catégorisant ainsi ces streams et téléchargements de musique comme des licences en vertu du Contrat (malgré le fait que le Contrat est sans aucun doute un contrat de vente de disques traditionnel).
Le Défendeur a notifié ses conclusions en défense le 21 février 2021, s’opposant à l’Assignation dans son intégralité (la ‟Défense”). Il a fait valoir – comme il l’avait probablement fait, avant que le Demandeur ne lui notifie l’Assignation déposée auprès de l’IPEC – que les téléchargements numériques, y compris les streams, étaient considérés comme un nouveau format technologique et que le Demandeur n’avait droit qu’au taux de redevance de 13,5 pour cent sur ces streams et téléchargements, comme toute autre vente dans le cadre du Contrat.
En outre, dans la Défense, le Défendeur a déposé une demande de radiation et/ou de jugement sommaire (‟summary judgment”) parce que les avocats du Défendeur avaient envoyé une lettre non confidentielle au Demandeur, le 16 novembre 2021 (la ‟Lettre”), indiquant que:
- le Défendeur avait fait une offre non-confidentielle de payer les sommes correspondant aux dommages-intérêts demandés en vertu de l’Assignation, et les frais d’avocats et dépens;
- le Défendeur avait informé le Demandeur qu’il avait donné pour instruction à tous les fournisseurs de services numériques (‟FSN”), tels que Spotify, de retirer les Masters, et s’était engagé à ne pas exploiter les Masters numériquement à l’avenir sans convenir au préalable de conditions écrites avec le Demandeur (ce qui, en tout état de cause, ne pouvait pas être le taux de 50 pour cent réclamé par le Demandeur pour l’exploitation), et
- à la lumière de l’offre susmentionnée du Défendeur, et de sa conduite ainsi que de ses engagements unilatéraux, la procédure judiciaire devait être suspendue ou, si le Demandeur n’était pas d’accord avec une suspension, le Défendeur demandait le rejet de cette procédure.
La réception de la Lettre, et la signification de la Défense, ont incité le Demandeur à requérir l’autorisation de modifier l’Assignation, étant donné qu’il considérait la conduite du Défendeur, qui avait retiré les Masters des FSN et avait déclaré qu’il ne les ferait pas exploiter numériquement à l’avenir, comme une violation du Contrat.
Le Défendeur a nié la violation et a déposé une demande de jugement sommaire le 25 novembre 2021.
Le Demandeur a requis l’autorisation au tribunal de modifier l’Assignation, pour y inclure ses demandes relatives à la conduite récente du Défendeur, le 6 décembre 2021.
Le Défendeur a écrit au Demandeur, le 14 décembre 2021, expliquant qu’il n’acceptait pas les modifications proposées à l’Assignation.
Une audience s’est tenue à l’IPEC le 16 décembre 2021, pour traiter les requêtes en justice concurrentes.
La juge Pat Treacy a rendu son jugement le 19 janvier 2022 (le ‟Jugement”).
3. Four Tet v Domino: alors, quels sont les enseignements?
3.1. Four Tet & Domino ont transigé via une offre ‟Part 36” et Domino paiera 50 pour cent des redevances de streams musicaux à Four Tet à l’avenir
Le point le plus important à retenir de cette affaire est que le Demandeur a annoncé, via un tweet envoyé le 20 juin 2022, que lui et le Défendeur étaient en train de transiger la procédure judiciaire via une offre de protocole transactionnel intitulée ‟part 36”.
Dans cette offre ‟part 36”, que le Demandeur a rendue publique via un autre tweet en date du 20 juin 2022, il est indiqué que le Défendeur a fait cette offre pour transiger l’ensemble des demandes, si elle est acceptée par le Demandeur dans les 21 jours suivant la signification de l’offre ‟part 36”, comme suit:
- en ce qui concerne tous les revenus historiques de streaming et de téléchargement de la période comptable commençant le 1er juillet 2017 (c’est-à-dire la période comptable qui commence à courir à partir de la date de 3 ans avant la date à laquelle l’Assignation a été notifiée), le Défendeur paiera au Demandeur la somme de GBP56.921,08, calculée comme étant la différence entre les redevances qui auraient été dues au Demandeur au taux de 50 pour cent réclamé par le Demandeur, et ce qui a été payé au taux de 18 pour cent à ce jour;
- le Défendeur paiera des intérêts simples sur la somme historique calculée comme étant due au taux de 5 pour cent par an;
- à l’avenir, le Défendeur paiera un taux de redevance de 50 pour cent pour tous les revenus de streaming et de téléchargement pour lesquels le Défendeur n’a pas encore rendu compte au Demandeur, et
- cette offre ‟part 36” est faite en règlement complet et définitif de toutes les demandes effectuées dans le cadre de la procédure (y compris, pour éviter tout doute, toutes les demandes énoncées dans la version modifiée de l’Assignation).
Un autre tweet du Demandeur montre l’avis d’acceptation de l’offre de protocole transactionnel ‟part 36”, signé par lui en date du 5 mai 2022.
Affaire classée.
3.2. L’obligation continue du label d’exploiter les Masters dans le domaine public peut survivre à la résiliation de toute disposition d’enregistrement exclusif du Contrat
Dans le Jugement, la juge Treacy a convenu que le Défendeur pouvait avoir une obligation continue, expresse ou implicite, d’exploiter, ainsi qu’une obligation de bonne foi, en ce qui concerne la diffusion et l’exploitation des Masters, même après la résiliation des dispositions d’enregistrement exclusif du Contrat en 2005.
Par conséquent, si cette question devenait pertinente au procès (par exemple dans le contexte d’un différend quant à savoir si les actions du Défendeur, qui avait exigé que les FSN cessent la diffusion numérique des Masters, avaient été faites de bonne foi), alors la requête du Demandeur de modifier l’Assignation, en ce qui concerne l’obligation expresse ou implicite du Défendeur d’exploiter, ainsi que son obligation de bonne foi, était raisonnable.
Le message est clair.
Maisons de disques, méfiez-vous: n’essayez pas de faire pression sur vos artistes-interprètes, en les menaçant, ou pire encore en exécutant de telles menaces, de retirer tous les enregistrements sonores de vos artistes des FSN, afin de les faire taire lorsqu’ils vous demandent de rendre compte des streams musicaux et les téléchargements sous forme de licences, et de leur payer un taux de redevance de 50 pour cent sur ceux-ci.
Supprimer des chansons des FSN peut enfreindre l’obligation expresse ou implicite des labels de musique d’exploiter, ainsi que d’agir de bonne foi, comme le confirme le Jugement.
Ce point de vue, exposé dans le Jugement, va dans le sens exprimé par la Commission, dans le Rapport et le Projet de loi, et avant cela par la Commission et le Parlement européens, dans leur Directive de l’Union Européenne sur le droit d’auteur dans le Marché Unique Numérique 2019/790 (la ‟Directive MUN”), que:
- le principe dit de rémunération appropriée et proportionnée devait s’appliquer, sur la base des principes de rémunération équitable, dans les relations contractuelles entre les labels de musique et leurs artistes-interprètes;
- un mécanisme d’ajustement des contrats devait être mis en place, de sorte que les artistes-interprètes puissent demander une rémunération supplémentaire, appropriée et équitable lorsque la rémunération initiale est disproportionnellement faible par rapport aux revenus pertinents tirés de l’exploitation ultérieure, et
- un droit de révocation devait exister et pouvait être utilisé lorsqu’une œuvre protégée par le droit d’auteur sous licence exclusive n’est pas exploitée par le titulaire de la licence (c’est-à-dire les maisons de disques).
En effet, alors que le Demandeur ait demandé l’autorisation de modifier l’Assignation, afin de faire valoir que le droit d’auteur sur les Masters devait être retransféré au Demandeur, puisque le Défendeur n’avait pas exploité ces Masters de manière continue en les retirant des FSN, le Jugement confirme que l’Assignation peut être modifiée à cet égard.
Pourquoi Domino a refusé de négocier avec Four Tet, avant l’Assignation, calmement et hors de la sphère publique, au vu des récentes évolutions juridiques susvisées déclenchées par la Directive MUN, le Rapport et le Projet de loi, est au dessus de ma compréhension: non seulement il a terni sa réputation, en apparaissant comme un label de musique indépendant déconnecté, cupide et monolithique, mais il n’a pas réussi à contenir un tel désastre ‟relations publiques”, en laissant Four Tet rendre publics les détails de leur protocole transactionnel via les réseaux sociaux.
C’est vraiment un parfait exemple de ce qu’il ne faut pas faire, en tant que label musical, lorsque votre talent demande la renégociation de sa part de royalties sur les streams et téléchargements musicaux.
En ce qui concerne Four Tet, il a joué ses cartes avec une habileté, un sens des affaires et une chuztpah considérables, tout en gérant son propre dossier juridique de très près et avec parcimonie (menant la procédure judiciaire en son propre nom, sans ‟solicitor of England & Wales”). Alors qu’il aurait aimé obtenir de Domino qu’il lui restitue les Masters, dans le cadre de l’offre transactionnelle finalement conclue par les parties en mai-juin 2022, Four Tet a eu l’intelligence d’accepter l’offre de protocole transactionnel ‟part 36”, qui lui accordait la plupart de ses demandes et souhaits de toute façon, tout en effaçant le risque d’être tenu responsable en justice de payer l’intégralité des frais de Domino (dans l’hypothèse où il aurait rejeté cette offre ‟part 36”, et dans le cas où le jugement obtenu par la suite n’aurait pas été plus avantageux que l’offre ‟part 36” de Domino).
En tant qu’artiste-interprète, vous devez être extrêmement bien préparé, concentré et prêt pour la bataille, si et quand vous voulez renégocier la répartition des redevances des streams avec votre label de musique, et la stratégie de Four Tet est un excellent exemple à suivre.
Depuis, Four Tet est passé à autre chose, en signant un contrat d’édition exclusif et mondial avec Universal Music Publishing, et en créant son propre label, Text Records, via sa propre société Four Tet Limited.
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